Qui suis-je vraiment sous traitement ?
Un jour, j’ai réalisé que certaines de mes émotions ne semblaient plus tout à fait… les miennes.
Il y a des jours où tout est terne, gris, sans relief. Et puis, d’autres où la joie explose, tellement forte que j’ai l’impression de vouloir vomir des arcs-en-ciel. Je ne sais jamais à quoi m’attendre en me réveillant.
J’ai appris à ne plus m’identifier à mes pensées, à prendre du recul. Mais quand l’euphorie dure trop longtemps, quand elle devient trop intense, je me surprends à en vouloir encore, à la chercher comme une drogue. Et quand la tristesse s’invite, c’est la même chose, sauf que cette fois, c’est beaucoup moins drôle.
Alors, je me pose la question : où est la frontière entre moi et l’effet des antidépresseurs ? Ce médicament est censé m’aider à réguler quelque chose en moi. Mais si c’est lui qui lisse mes émotions, qui module mes réactions… est-ce que je pense encore vraiment par moi-même ?
Le brain fog : l’invisible dans la tête
Parfois, c’est comme si mon cerveau refusait de démarrer. Je cherche mes mots, mes idées s’embrouillent, ma concentration m’échappe. Un vrai bug mental.
Le paradoxe, c’est ça : je prends ce traitement pour aller mieux, pour soulager mes douleurs digestives. Mais en retour, j’ai l’impression d’être déconnectée de moi-même.
La stigmatisation : quand dire "je prends des antidépresseurs" suffit à être jugé
Quand j’en parle, les réactions sont souvent les mêmes. Une surprise mal cachée, un regard en biais, des phrases qui tombent à plat :
"Mais tu n’as pas l’air malade."
Évidemment. C’est mon estomac qui en fait une scène dès que je stresse. Ce que les autres ne voient pas, c’est ce que ça signifie réellement de vivre avec un trouble chronique.
Ils pensent que c’est un détail, que "beaucoup de gens ont des problèmes". Sauf que mon quotidien, c’est ça : je mange, j’ai mal au ventre. Je ne mange pas, j’ai des nausées et des migraines. Si je mange trop, c’est la diarrhée. Sinon, c’est la constipation. Et tout ça, juste parce que mon corps traduit le stress à sa manière.
Une autre réalité de la santé mentale
La santé mentale, ce n’est pas juste "arrêter d’être triste" ou "penser positif". Si c’était aussi simple, on aurait trouvé la recette miracle depuis longtemps.
Ce que personne ne dit, c’est qu’apprendre à vivre avec un traitement, c’est accepter de ne pas savoir combien de temps il faudra le prendre. Une semaine, tout va bien, et la suivante, tout se dérègle.
Et puis il y a cette question : qui suis-je, en dehors du médicament ?
Et si on écoutait vraiment ?
Peut-être qu’au lieu de juger, il faudrait commencer par écouter. Comprendre que la santé mentale est une réalité plus complexe que les clichés.
Aujourd’hui, j’apprends encore à composer avec mon trouble. J’ai compris que tout est lié : mon cerveau, mes émotions, mon système digestif. Tout doit être en équilibre pour que ça fonctionne.
Quant aux antidépresseurs, j’ai arrêté d’avoir honte. Parce qu’au final, ils m’aident bien plus que tous les conseils simplistes qu’on m’a donnés.
PS : Ce texte reflète une partie de mon parcours personnel avec la santé mentale et les traitements. J’ai choisi de partager cette expérience dans un but de sensibilisation, mais cela ne doit pas être interprété comme une indication de mes capacités professionnelles.
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